ChemAI : Mettre l’IA au service de la recherche en chimie

A l’aide de solutions innovantes basées sur l’intelligence artificielle, ChemAI s’apprête à transformer le secteur de la chimie en simplifiant et en accélérant considérablement les recherches. Rencontre avec Thomas Galeandro-Diamant, directeur technique de l’entreprise ChemAI

Publié le 08/07/2025

Quel parcours vous a conduit à développer l’offre innovante actuelle ?

Thomas Galeandro-Diamant : Derrière ChemAI se cache en réalité une entreprise appelée ChemIntelligence, une startup que j’ai fondée il y a une dizaine d’années. Je travaillais jusque-là en tant que en tant que chercheur en chimie chez Solvay. L’engouement pour l’intelligence artificielle était alors croissant au sein de la communauté scientifique. De nombreux chercheurs étrangers étaient invités à donner des conférences sur le sujet, et l’intérêt pour cette technologie était manifeste. Mais malgré cette curiosité, il y avait une difficulté à comprendre comment utiliser l’IA de manière concrète et efficace. Les grandes entreprises de chimie n’avaient pas la flexibilité nécessaire pour adopter rapidement ces nouvelles méthodes. L’idée de créer ChemIntelligence a alors vu le jour, dans le but de développer une structure agile et spécialisée qui aide les industriels à exploiter l’IA dans la synthèse et la formulation des molécules. En 2022, cette entité a été rachetée par ChemAI, positionnée sur la même activité, mais avec un portefeuille de clients plus focalisée sur la pharmacie et la chimie fine.

 

Qu’est-ce qui distingue ChemAI des autres entreprises du secteur ?

Thomas Galeandro-Diamant : Notre différence repose sur notre approche des données. Nous avons mis en place une stratégie en trois niveaux pour garantir la meilleure exploitation possible. Dans une base de données unique, nous accumulons plus de 5 millions de réactions chimiques, ce qui constitue une ressource précieuse pour entraîner nos algorithmes.

Par ailleurs, nous proposons une structuration avancée de l’information : de nombreuses entreprises possèdent des données chimiques mais ne savent pas comment les rendre exploitables par l’IA. ChemAI a développé une suite logicielle capable de structurer ces données pour les transformer en ressources utilisables.

Enfin, la création de données expérimentales est un autre point clé : nous avons constaté que les bases de données disponibles ne contiennent que des expériences réussies. Or, l’IA a besoin d’échecs pour apprendre efficacement. Nous menons donc nos propres expérimentations en laboratoire pour produire des données équilibrées entre réussites et échecs.

 

Quelles sont les principales applications de votre technologie ?

Thomas Galeandro-Diamant : Elles concernent trois domaines clés :

– La rétrosynthèse : notre technologie permet aux chimistes de définir la meilleure succession de réactions pour obtenir une molécule cible.

– L’optimisation des réactions et des formulations : en utilisant l’IA, nous aidons les chercheurs à identifier les paramètres idéaux pour maximiser le rendement, minimiser les déchets et réduire la consommation énergétique.

– La prédiction des résultats expérimentaux : nous développons une technologie qui pourra prédire, avec une grande précision, le résultat d’une expérience chimique avant même qu’elle ne soit réalisée.

De façon générale, l’objectif est de permettre aux chimistes de travailler plus efficacement en leur fournissant des outils basés sur l’IA qui simplifient et accélèrent leurs recherches.

 

Comment peut-on décrire les avantages de votre technologie ?

Thomas Galeandro-Diamant : Le premier avantage est le gain de temps. Nos outils permettent aux industriels de réduire considérablement le nombre d’expériences nécessaires par projet. Moins d’expériences signifie que davantage de projets peuvent être menés en parallèle, augmentant ainsi les chances de succès.

Un autre atout clé est la durabilité. En intégrant des critères environnementaux aux objectifs des clients, l’IA peut les aider à choisir des solutions optimales en termes de rendement et de réduction des déchets. Par exemple, en rétrosynthèse, il est possible de demander à l’IA de trouver la synthèse la plus courte et la moins énergivore. Cela permet de développer des procédés plus verts et plus durables.

 

Qui sont vos clients ?

Thomas Galeandro-Diamant : L’industrie pharmaceutique constitue bien sûr une part importante de nos clients, mais nous travaillons également avec d’autres secteurs, comme le domaine cosmétique, des matériaux et même l’aéronautique, pour les recherches sur les matériaux composites.

Des grandes entreprises de renom comme AstraZeneca, L’Oréal ou encore Sanofi figurent déjà parmi nos références. L’entreprise élargit peu à peu son champ d’action à d’autres acteurs industriels de premier plan.

 

A quelles perspectives économiques peut-on s’attendre pour ChemAI ?

Thomas Galeandro-Diamant : Nous avons déjà un chiffre d’affaires à sept chiffres, ce qui montre l’intérêt du marché pour notre technologie. Cependant, nous sommes encore soutenus par des investisseurs.

Notre activité liée à la structuration des données des clients est un fort levier de croissance à court terme. À plus long terme, nous prévoyons une forte expansion grâce à notre programme de génération de données, qui permettra aux industriels d’éviter les erreurs et d’optimiser leurs procédés avec une précision inédite.

Oui, nous travaillons déjà avec des clients en Europe et en Amérique du Nord. Nous avons également mené quelques collaborations en Asie, notamment en Corée-du-sud et à Hong-Kong. Le marché asiatique est une perspective intéressante pour notre développement futur.